Un appel téléphonique le lundi avant le mercredi des cendres
: c’est une animatrice de Radio Mélodie qui veut joindre le curé à propos de
l’origine religieuse des « beignets ». En voilà une question ! Pour l’histoire
de l'Église, la Bible, la théologie ou la liturgie, je pense être suffisamment
cultivé, mais pour ce type de question culinaire, j’avoue mon ignorance.
Toutefois je lui réponds qu’il me semble cohérent qu’avant le grand jeûne du
carême, on fasse carnaval (d’autant plus que ‘carnaval’ vient de ‘carne’ c’est
à dire viande) et que divers gâteaux agrémentent ces derniers jours de
festivité. De plus, les beignets étant forcément fris, et donc bien gras, il
n’est pas impossible qu’ils ont été à l’origine de l’appellation « mardi gras
».
Dans ma
prière du soir, reprenant ma journée, j’ai trouvé dommage de ne pas avoir
profité de cette occasion pour relier cette histoire à l’épisode d’Elie (1 Roi
19) : avant sa marche de 40 jours au désert (anticipation du carême) et sa
rencontre avec Dieu qui n’est pas l’expression des forces de la nature ou le
Jupiter qui terrasse ses ennemis par la foudre, mais Celui qui parle au cœur de
l’homme, donc avant cette expérience spirituelle, par deux fois, un ange fût
chargé de nourrir Elie d’une galette et d’un peu d’eau, car « sinon la route
aurait été trop longue pour lui ». Nos beignets ne sont-ils pas comme un écho
lointain de cette invitation divine : prenez des forces pour avancer sur la
route spirituelle à la découverte de Celui qui donne sens et transforme notre
existence. Pour les chrétiens, ce pain pour la route est par excellence
l’Eucharistie.
Des jours
plus tard, dans un autre temps de prière et de méditation, je n’ai pas pu ne
pas faire le lien avec ce qui se passe à l’autre bout du Carême, avec le
triduum pascal et Pâques. En effet, nous allons trouver de nombreuses photos et
articles dans la presse des crécelleurs – et tous ne sont pas forcément des
enfants de chœur – et peut-être vais-je avoir une demande analogue à celle des
beignets quant au départ des cloches le jeudi saint. Si le lièvre de Pâques est
une réminiscence païenne du culte du printemps, le joyeux carillon des cloches annonce
à tous la Bonne Nouvelle de la Résurrection du Christ et invite les chrétiens
tout au long de l’année à célébrer cet événement et ce mystère. Il en est de
même pour les œufs de Pâques, qu’ils soient décorés à la manière orientale, les
fameux pisanki, ou en chocolat selon notre tradition plus occidentale : ils
sont symbole de vie, de la vie divine révélée dans le Christ Ressuscité.
Le folklore
peut ainsi devenir encore une invitation pour nos contemporains à une démarche
de recherche de sens et de vérité sur soi-même. Comme souvent, un petit
événement peut devenir l’occasion d’une véritable mise en route et mener
loin...
En Église,
nous aurons la joie de célébrer tout au long de ce Carême dans notre
archiprêtré la « traditio » (la transmission du ‘Notre Père’ et du ‘Credo’) et
les « scrutins » (étapes finales) pour deux adultes, Sandra à Grosbliederstroff
et Sylvie à Sarreguemines, qui recevront le baptême (et l’Eucharistie tout
comme la confirmation) lors de la Vigile pascale. N’est-ce pas là un signe fort
que le Seigneur parle toujours au cœur des hommes et des femmes de ce temps, et
cela à tous les âges de la vie.
C’est aussi
ce que nous voulons vivre et célébrer lors du dimanche intergénérationnel qui
se veut être un temps fort – c’est pourquoi la messe unique – de notre
communauté de paroisses, le dimanche 6 avril prochain. Que la joie, la lumière
et la force du Ressuscité fassent de nous des vivants, de la vie même de Dieu.
Christ est
ressuscité ! Bonnes et saintes fêtes de Pâques !
Abbé
Jean-Luc JOST +